Ce serait une gageure de penser qu’il suffit d’un «bon» contact auprès d’un acheteur étranger pour commencer à envoyer ses toutes premières palettes à l’autre bout du monde… J’entends déjà ceux qui disent :
«Pfff !!! Pourtant c’est exactement comme ça que cela s’est passé pour moi !»
Je n’ai pas dit que ce n’était pas possible, seulement que si tout s’est bien passé, vous avez eu de la chance … Je ne sais pas vous, mais moi, je n’aime pas les surprises (enfin pas dans mes affaires). J’aime bien me préparer au maximum, tout étudier pour ne pas me retrouver coincée à gérer une crise d’un container bloqué en douanes, de problèmes pour se faire payer ou de productions incapables à livrer …
Le meilleur moyen d’avoir ce sentiment de maîtrise (tout relatif, je le conçois) est de mettre en oeuvre une démarche planifiée à l’exportation. C’est ce qui s’appelle une planification stratégique à l’international.
Se développer à l’international coûte cher et cela peut-être compliqué ! La meilleure attitude à adopter est donc d’avancer de façon méthodique et organisée.
La planification stratégique à l’international est très utile car elle permet notamment de réduire les risques liés au développement des affaires sur les marchés étrangers, d’obtenir le financement nécessaire à son projet en amont mais aussi une croissance des ventes plus stable, plutôt qu’un «coup» de temps en temps.
Avoir un plan d’action et une démarche planifiée augmentent de façon considérable les chances de réussite d’une entreprise sur les marchés étrangers !
5 étapes sont nécessaires afin de bien se préparer :
- le diagnostic à l’exportation
- la recherche de financement
- la mise aux normes et l’obtention des certifications/homologations
- l’étude de marché
- le développement de la stratégie marketing
1 – Diagnostic à l’exportation
La toute 1ère étape de la planification stratégique à l’international est d’effectuer un diagnostic à l’exportation. Cela permettra à l’entreprise de connaître ses forces et ses faiblesses et d’évaluer si, oui ou non, elle est en mesure d’exporter.
En répondant aux questions du diagnostic, vous découvrirez de façon objective le niveau de préparation de votre entreprise aux marchés étrangers, la capacité de vos équipes à absorber un surplus de production et l’engagement de votre direction à un développement à l’international.
Cette étape est primordiale car toutes les entreprises ne sont pas en mesure d’exporter. C’est ce stade qui permet de déterminer si votre projet est réalisable ou non.
Qu’est-ce qu’un diagnostic à l’exportation ?
Un diagnostic est une cartographie de votre entreprise et de vos produits ou services, face aux contraintes et opportunités d’un marché étranger.
Il comprend 2 aspects distincts :
- une analyse interne : le diagnostic interne qui vous permettra de connaître les forces et les faiblesses de votre propre entreprise.
- une analyse externe : diagnostic externe qui vous indiquera les menaces et les opportunités du marché étranger
Sa réalisation au sein de l’entreprise
Le diagnostic s’effectue en général en deux jours :
- une journée d’entretien avec vos équipes et visite des locaux
- une journée de rédaction du compte-rendu et du plan d’action
Bien évidemment, plus la taille de l’entreprise est importante, plus le nombre d’entretiens avec les directeurs des différents services prend du temps. Nous pouvons donc être amenés à passer plus de 2 jours dans vos locaux.
Nous arrivons avec une grille de questions à poser à vos responsables de services : direction générale, ressources humaines, production, achats et approvisionnement, vente et marketing, innovation et technologie, etc.
Avec les réponses collectées, nous analysons les données afin de vous donner une interprétation de votre potentiel à l’exportation dans un compte-rendu.
Le compte-rendu
Le compte-rendu se compose de deux parties : l’interprétation des résultats et le plan d’action.
3 résultats sont possibles :
- NÉGATIF : vous n’êtes pas prêt ! Les faiblesses sont trop importantes et le potentiel international trop faible. Le risque auquel vous vous exposeriez serait trop important
- POSITIF AVEC DES RÉSERVES : L’entreprise présente des lacunes mais surmontables. Le plan d’action vous permettra de mettre en oeuvre des solutions vous permettant de remédier à ses actions.
- POSITIF : L’entreprise ne présente aucune faiblesses majeures et le potentiel international est élevé.
Nous vous remettons avec le compte rendu, un plan d’action comprenant les mesures correctives ou le plan d’affaires à l’international à mettre en oeuvre. Ce plan d’action déterminera les étapes à mettre en oeuvre pour la mise aux normes et l’obtention des certifications (étape 3 de la planification stratégique à l’international) et orientera le budget pour la recherche de financement (étape 2).
2 – Recherche de financement
La décision d’exporter entraîne inexorablement une augmentation du budget de l’entreprise. La 2ème étape de la planification stratégique à l’international est donc le financement.
L’évaluation du budget
Parmi les nouvelles dépenses, on peut envisager :
- le recrutement d’un Directeur export ou d’un agent ou commercial
- l’investissement dans des études de marché,
- les coûts de marketing à l’international (déplacements de prospection, salons, etc.)
- une immobilisation financière accrue avec l’augmentation des stocks afin de répondre aux commandes
- une mise aux normes des produits
- l’obtention de certification
- l’augmentation du fonds de roulement
- etc.
La recherche de financement
Les subventions :
Au Canada, il existe de nombreux programmes permettant de financer une partie de son développement à l’international.
Le Groupe Export Agroalimentaire avec son programme Soutien aux Exportations Bioalimentaires (SEB) du MAPAQ ou son programme Agri-Marketing (AAC) permet d’obtenir plus de 100 000$ de financement par projet.
D’autres programmes fédéraux et/ou provinciaux pourront également vous aider à :
- vous mettre aux normes,
- obtenir des outils nécessaires à une gestion internationale
- augmenter votre capacité de production
- financer vos déplacements à l’étranger
- vous informatiser,
- bâtir une stratégie de webmarketing
- etc.
Nous avons réussi, juste l’année dernière (2019), à obtenir plus de 878 000$ de subventions pour 3 clients. Contactez-nous si vous voulez savoir si vous seriez éligible à une subvention.
Les aides financières des établissements financiers :
L’affacturage est un bon moyen de financer le poste clients de son entreprise. Il permet de céder à l’organisme financeur, la créance de son client et d’obtenir ainsi immédiatement la trésorerie correspondante (moyennant un %).
Cela permet également de limiter le risque client puisque l’organisme prendra des garanties sur votre client et n’acceptera la transaction que si le client est solvable (pour être sur d’être payé in fine).
3 – Mise aux normes et obtention des certifications
La 3ème étape de la planification stratégique à l’international est indiquée le cas échéant dans le plan d’action remis lors du diagnostic à l’exportation. Celui-ci déterminera si oui ou non votre produit nécessite une mise aux normes ou homologation avant d’être exporté.
Dans le cadre d’une exportation vers l’Europe, la règlementation européenne est tellement complexe qu’il y a de fortes chances que vous n’y échappiez pas …
L’Europe ou le pays des normes …
Le droit européen, que nous connaissons particulièrement (je suis titulaire d’une maîtrise en droit de l’Université de Bordeaux) impose que les marchandises importées répondent aux exigences techniques, de sécurité et d’étiquetage tel que définies par la législation européenne. Avant de pouvoir arriver en Europe, vos marchandises doivent respecter les exigences de l’UE en matière de protection de la santé humaine et animale, de l’environnement et des droits des consommateurs.
Ces exigences ont des implications dans 6 domaines ou catégories de produits :
- Sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux qui édictent des règles sur la production et la distribution des aliments, l’hygiène, la présence de résidus de pesticides et de contaminants et la traçabilité des produits importés
- la santé animale impose des autorisations du pays exportateur, des agréments d’établissements de transformation et des certificats sanitaires
- la santé végétale impose des certificats phytosanitaires, des inspections et des agréments spécifiques
- la santé publique qui comprend les normes concernant la commercialisation des produits de l’agriculture et de la pêche mais aussi les produits issus de l’agriculture biologique
- la sécurité des produits qui touche les produits cosmétiques, industriels (chimiques, machines, etc.) et pharmaceutiques
- la normalisation technique avec le fameux Marquage CE
- les emballages visent à protéger l’environnement et indique la composition des matériaux autorisés
Nous avons consacré un article complet sur les besoins de certifications des produits alimentaires, que vous pourrez retrouver ici : Certifications Canada Vs Europe : quel réel besoin pour les entreprises ?».
Un futur article sur le Marquage CE est en cours d’élaboration. Abonnez-vous à notre infolettre pour être sûr de ne pas le manquer.
Des délais à ne pas négliger
L’obtention d’une certification peut-être longue, comme nous le mentionnons dans l’article cité ci-dessus, et durer des mois. A titre d’exemple, une certification ISO 22000 prend entre 8 à 18 mois à mettre en place et à obtenir.
Ces délais sont incompressibles car ils comprennent du temps consacré à la conception et à la documentation du système, du temps de formation du personnel, éventuellement des travaux nécessaires, puis le temps de l’audit et de l’enregistrement.
Vous comprenez maintenant l’intérêt d’effectuer une bonne planification stratégique à l’international. Sans elle, vous vous seriez retrouvé avec des produits impossibles à expédier, ou pire à devoir reprendre car pas aux normes ou non homologués …
4 – Étude et sélection des marchés étrangers
L’étude de marché est indispensable. Elle permet de cibler les marchés, de segmenter des prospects ce qui servira à l’élaboration de la stratégie marketing.
Entre recherche documentaire et analyse terrain, cette étude devra porter sur 2 aspects : une étude socio-économique et culturelle du pays (coutume, partenariats, concurrence, etc.) et une étude de la clientèle potentielle (tendances générales de consommation et données démographiques).
Bien entendu cette étude étant longue, il est recommandé de limiter son choix à 2 voire 3 marchés potentiels où vos produits et services ont un potentiel de croissance
L’étude pays
Sans détailler précisément tous les aspects de l’étude d’un pays étranger, s’il fallait en retenir 4, nous dirions que les données les plus importantes à connaître concernent :
- la réglementation en commerce international et l’existence (ou non) d’accords commerciaux,
- l’environnement politique et la stabilité du pays,
- la présence de concurrents locaux ou internationaux,
- le réseau de transport et de communication
En collectant des données fiables sur ces aspects, vous serez en mesure de déterminer les opportunités et les menaces que présentent ces différents marchés.
L’étude des clients potentiels
Il s’agit là de récolter des informations sur votre clientèle cible. Connaître son âge, son sexe, ses habitudes d’achat, son lieu de vie, ses freins à l’achat, etc. permet de déterminer un profil-type d’acheteur potentiel.
Vente de légumes sur un marché à Tahiti
Si l’habitude d’achat des consommateurs est d’acheter leurs fruits et légumes dans des marchés locaux, ce n’est peut-être pas la peine d’essayer de les faire venir dans des supermarchés …
Nous vous recommandons très fortement à cette étape, de ne pas négliger la culture d’affaires du pays. Les principaux freins que nous rencontrons au développement à l’international de nos clients français ou canadiens actuellement, est presque toujours une mauvaise appréhension des diversités culturelles.
Le faux-ami qui est la langue française commune augmente les malentendus entre les deux communautés. Si nous parlons la même langue, il s’agit par contre d’un tout autre langage. Cela crée des freins considérables au développement d’affaires dans les 2 pays respectifs.
Nous offrons des formations sur la culture d’affaires en France et au Canada. N’hésitez pas à nous contacter si vous êtes intéressés ; cela pourra être un tremplin idéal à votre croissance à l’international.
Une fois les informations recueillies, c’est là que l’on passe à l’étape 5 pour adapter votre stratégie et vos produits au marché cible.
5 – Développement de la stratégie marketing
L’analyse des données collectées a permis de déterminer quel est le pays le plus intéressant pour vous. Il faut maintenant élaborer la stratégie marketing qui est l’étape finale de la planification stratégique à l’international.
Qu’est-ce qu’une stratégie marketing ?
Pour faire simple, la stratégie marketing est la façon dont l’entreprise souhaite mettre en place sa (ou plutôt «ses» devrais-je dire) politique(s). Il n’y a pas de formule unique puisque tout dépend de votre entreprise, votre vision et votre mission.
Ces politiques sont :
- la politique du produit (product)
- la politique de prix (price)
- la politique de distribution (place)
- la politique de communication (promotion)
C’est ce que l’on appelle communément en jargon de marqueteur les «4P» ou le marketing mix.
Cette politique que vous allez mettre en place (ou stratégie) va vous permettre d’atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés. Bien entendu vous devez vous servir des informations collectées lors de l’étude de marché. On ne fixe pas des politiques sans connaître le contexte du marché et de la clientèle que vous souhaitez atteindre.
Comment élaborer ses propres politiques ?
La politique de produit concerne l’ensemble des caractéristiques de votre produit.
C’est ici que vous allez définir son positionnement (haut de gamme, bas de gamme), sa qualité, le design et l’apparence, l’emballage, l’étiquetage.
Elle comprend également des décisions sur les garanties appliquées, le service à la clientèle, les marques.
La politique de prix concerne le prix de vente du produit en fonction du type de distribution que vous allez mettre en place. Ainsi vous devrez déterminer un prix en fonction des quantités commandées ou du type d’acheteur (détaillant ou importateur) ce qui revient un peu au même, je vous l’accorde …
Les rabais et ristournes qui peuvent être octroyés aux clients, devront également être définis tout comme les conditions de paiement, de crédit, les devises acceptées, etc.
La politique de distribution concerne la façon dont vos produits seront distribués.Le diagnostic export vous a donné des informations capitales qui vont vous permettre de définir un mode de distribution pour vos produits.Le mode de fabrication de vos produits et les contraintes en matière de stockage, la livraison, le nombre de points de vente, etc. sont autant de facteurs qui devront vous aider à établir votre politique de distribution.
La politique de communication permet de donner de la visibilité à votre produit, d’attirer les clients potentiels, de conclure des ventes et de fidéliser votre clientèle.
La publicité comprend plusieurs canaux tels que les sites internet, les réseaux sociaux, la télévision, la presse. Mais d’autres moyens sont également à votre disposition tel que les salons et foires commerciales. Cependant ces moyens étant plus coûteux, ceux-ci ne sont pas donnés à tout le monde car ils demandent un investissement en temps et en argent élevé. Néanmoins, bien préparés, ils peuvent s’avérer être un formidable outil avec un retour sur investissement élevé.
Notre article «Salon international : pour qui ? pourquoi ? comment ?» vous donnera les pistes pour bien vous préparer et savoir si cela est adapté pour vous.
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